Critique du roman Motus et Bouche Cousue

Malgré le super concept auquel l’on avait songé, à savoir : rendre une page blanche pour cette chronique, afin de coller au titre Motus et Bouche Cousue (Bayard Jeunesse), l’on s’est finalement décidé à véritablement en parler. Piégé par Anthony, le personnage principal du livre d’Ellie Irving, qui même s’il ne s’exprime plus oralement, continue à l’écrit…

Motus et bouche cousue

Ce n’est pas par maladie qu’Anthony Bouton, 10 ans, 2 mois et 26 jours, ne peut parler. Il n’a ainsi pas non plus été touché par un mal, qui l’aurait contaminé, le transformant en muet ou en batracien à taille humaine pratiquant des arts martiaux. Vous comprendrez cette référence en lisant le roman. Son mutisme tire son origine de sa révolte contre sa famille. Ayant déjà du mal à trouver sa place, tant sa mère, ses 2 sœurs, son père et ses 2 frères, semblent être ancré(e)s dans un rôle défini au sein de celle-ci. Avec une passion, une caractéristique propre, que l’on met en avant. Qui d’ailleurs agacent généralement tout autant le jeune  » héros « , que ce fait de ne pas se sentir pleinement considéré.

Et cela va de mal en pis, via la rencontre avec le fils de son père, Ben. Que celui-ci a découvert il y a peu. Un nouveau frère donc, dont tout le monde fait la connaissance chez Pizza Express. Par conséquent cela lui ferait au moins plaisir s’il était un de ces fameux batraciens, par le repas qui l’attend. Mais ça va dans sa situation aussi, puisqu’il pourra se délecter d’une pizza avec une certaine combinaison de fromages. Ces derniers étant sa grande passion. Il apprécie également le football. Malheureusement selon lui, c’est aussi le cas de son frangin aîné, rencontré il y a quelques minutes. Du potentiellement passionné du ballon rond, il se retrouve à ne rien évoquer, hormis le fromage, par crainte de railleries en copiant Ben, le footballeur.

Car contrairement à Ant’, celui-ci a en plus l’air d’avoir un bon niveau. Même s’il préfère Bristol Rovers, alors que leur père est supporter de Swindon. Cependant, les liens n’ont pas été rompus suite à cette rapide révélation. Au grand dam du jeune garçon. Dans ce cas, il s’occupera lui-même de faire que ça arrive, en ne sortant plus une parole de sa bouche, suite à une phrase du patriarche. Et en fomentant l’Opération DIB : Dégageons cet Idiot de Ben. Quand l’on évoque le fait qu’il stoppe toute expression orale, il ne fait pas semblant : maison, école, copines/copains… Motus et bouche cousue, comme le dirait un certain ouvrage littéraire !

Ce qui peut s’envisager comme un caprice, d’autant plus qu’à travers la narration et le journal intime du personnage, l’on se rend compte qu’il en veut à pas mal de monde. Voire quiconque dans son cercle familial. Néanmoins, ce comportement lui permettra en parallèle de dévoiler bien des aspects autour de lui. Particulièrement, au niveau de l’amitié. Ainsi qu’au sein de sa famille. Où finalement, l’on se demande s’il n’a jamais autant discuté avec celle-ci, que depuis son mutisme. L’on y croise des moments très forts émotionnellement, comme la scène lors des courses, avec une de ses frangines. Qui par ailleurs, nous laisse croire qu’Anthony est un réel céréales killer… Mais ses parents s’inquiètent et il se retrouve chez une psychologue. Une peur sur laquelle les autres enfants comptent bien jouer, afin d’y gagner des vacances à Disneyland Paris. Un machiavélisme poussant d’autant plus leur frère à perdurer.

Si le côté touchant et le doigt mis sur bien des sujets, notamment  » l’acceptation  » des autres, et pas uniquement de ce nouveau membre de la famille. Ainsi que le fait de trouver sa place, nous absorbent et nous poussent à la réflexion, l’œuvre s’avère simultanément immensément drôle. Entre les vannes qui fusent, les blagues du père moisies comme un fromage (ndla : ou un vromage pour moi), les séquences journal intime avec des listes souvent hilarantes… Sans omettre des manières de parler tellement vraies et sachant viser juste. Tant pour devenir crédibles, que pour fréquemment amuser. On pense à ce sujet grandement à la manière dont Anthony précise que Samir, un potentiel nouvel ami qu’il dénigrait pour l’instant, apprécie une certaine licence. Démontrant à quel point la traduction de Mim s’avère de haut niveau.

Conclusion

Des thèmes forts, un parlé vrai et immensément humoristique à la fois, font que l’on n’a pas envie de se taire à propos de Motus et bouche cousue.