Metal Gear Solid, trois mots qui pour bien des joueurs, désignent des souvenirs mémorables : Innovations de gameplay, explosion du 4ème mur, boss charismatiques, scénarios alambiqués et autres séquences What The F**k. Tant de termes pour décrire l’ADN de la saga.
Cet ADN nous le devons à Hideo Kojima, génie visionnaire pour certains, roi de l’esbroufe pour d’autres, le monsieur a pourtant marqué l’Histoire du jeu vidéo en réussissant l’exploit de faire interagir le joueur par delà la sphère liant ce dernier à son pad et son téléviseur. Mais à l’heure ou le contenu et la technique semblent méchamment prendre le pas sur l’innovation, Kojima tente de nous livrer ce qui semble être son chant du cygne, et celui-ci ce nomme : The Phamtom Pain.
A Hideo Kojima Konami Game
Pour tous ceux qui souhaiteraient prendre le train en marche, sachez que The Phamtom Pain se passe 9 ans après les événements narrés dans Ground Zeroes. Je ne serais trop vous conseiller d’avoir aux moins joué à Ground Zeroes et Peace Walker, mais il n’est pas vraiment nécessaire d’avoir fait MGS 3 et encore moins Portable Ops. Sachez tout de même que vous reprenez le contrôle de celui qu’on appelait autrefois Naked Snake pour finalement devenir Big Boss. Alors oui, c’est un peu bordélique présenté comme ça, mais l’histoire de Big Boss est si fascinante que je vous recommande chaudement de vous procurez les épisodes précités si vous voulez connaitre les moindres détails de sa légende.
Nonobstant cela, connaître MGS sur le bout des pouces n’a pas grande importance car cet épisode du renouveau, même s’il fait de nombreux clins d’œil aux opus précédents, ne semble pas vraiment parler aux fans des premières heures ayant suivi les péripéties de Solid Snake, Raiden ou même de Naked Snake. The Phantom Pain donne finalement l’impression d’être rentré dans le moule de l’open world tout public, privilégiant un gameplay d’une rare richesse au détriment du scénario omniprésent que l’on associait à la saga.
Cochon qui s’en dédit !
En ce qui concerne le gameplay, ceux qui se sont déjà essayés à Ground Zeroes retrouveront rapidement leurs marques : la jouabilité est toujours aussi souple, Snake est toujours aussi vif et incisif. Tout cela a été considérablement amélioré avec la possibilité d’émettre un son afin d’attirer les ennemis (comme dans les anciens épisodes), sans compter la possibilité de vous faire accompagner d’un équipier parmi quatre dont les capacités vous faciliteront bien la tâche pendant les missions. Ajoutez encore à cela la richesse de l’équipement que vous développerez progressivement et vous obtiendrez juste le B-A-BA de l’infiltration, le tout dans un splendide monde ouvert s’il vous plait.
Même si beaucoup de gens préféreront la furtivité a 100% quitte à recommencer la mission ad vitam æternam uniquement pour le score, ma préférence va au fait de résister même après avoir été repéré. Dès l’instant où l’alarme est donnée, un jeu de cache-cache commence avec les gardes qui sont alors à leur niveau d’alerte maximum. C’est pendant ce moment que les gardes agissent enfin avec un semblant de lucidité, et où vous devrez vous frotter à plusieurs d’entre-eux pour enfin parvenir à vous échapper du pétrin dans lequel vous vous êtes fourré. C’est pendant cet instant crucial que l’intensité est à son paroxysme et que cet ultime épisode de Metal Gear Solid révèle son plein potentiel.
Car jamais avant The Phantom Pain un jeu d’infiltration (ou même un MGS) n’aura offert ce moment d’extase où l’on arrive enfin, non sans mal, à s’échapper d’un bourbier où l’on croyait tout perdu d’avance et où la pleine mesure de l’équipement de Big Boss prend son intérêt.
D’un autre coté, oubliez les moments de gameplay sortant véritablement de l’ordinaire, et dites au revoir à jamais à l’escouade de boss charismatiques et complètement surréalistes auxquels Kojima nous avait habitué. Il y a bien sûr quelques boss au sens propre du terme, mais aucun ne vous fera frissonner l’épine dorsale autant que dans les épisodes précédents.
Snake ! Snaaake ! Snaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaake !
Pour ceux qui ne connaîtraient pas la Mother Base, sachez qu’il s’agit du QG des Diamond Dogs (anciennement Militaires Sans Frontières), groupe de mercenaires menés d’une main de fer (hahaha) par Big Boss. Ceux qui ont eu l’occasion de jouer à Peace Walker se sentiront en terrain connu.
Le but reste toujours de rallier des soldats en les capturant à l’aide du système Fulton pendant les missions, pour ensuite les intégrer à vos différentes unités. Ainsi, vous pourrez assigner vos différents hommes à l’unité de combat que vous enverrez sur le terrain pour vous rapportez des denrées précieuses, à l’équipe de recherche et développement afin de vous fabriquer de nouvelles armes et équipements, ou encore à votre unité médicale qui sera chargée de guérir tous les blessés que vous enverrez sur la Mother Base. Je vous laisse le plaisir de découvrir les nombreuses autres unités liées au jeu.
Sachez que les possibilités se débloquent au compte goutte, ne vous attendez pas à gérer tranquillement l’ensemble des unités dés le départ, comptez plusieurs dizaines d’heures avant que cela devienne intéressant car MGS V The Phantom Pain aura tendance à placer automatiquement les soldats recrutés dans les unités qui conviennent le mieux.
Pas de grand bouleversement dans ce système qui reste toujours aussi bien pensé, si ce n’est la possibilité de visiter enfin la Mother Base , à pieds ou en véhicule, alors qu’il ne s’agissait que d’un écran de gestion dans Peace Walker. On regrettera tout de même de ne pas pouvoir parler librement à Miller, Ocelot et aux autres figures emblématiques de cet épisode.
Attaquons maintenant LE point qui fâche : le rythme scénaristique de The Phantom Pain. Comme d’habitude un scénario capillotracté répond bien à l’appel, mais après un prologue qui annonce la couleur en nous en mettant plein la gueule, l’histoire retombe à un niveau de discrétion dont seul Snake a le secret (octocamo équipé). En effet, le scénario donne la mauvaise impression d’une noisette de Nutella étalée à son maximum sur une trop grande tranche de baguette. Bien que le pain soit succulent, l’histoire avance toute les 5 missions environ et sachant que le terrain de jeu est gigantesque, cela peut représenter des dizaines d’heures avant de voir quelque chose se produire enfin.
Beaucoup de questions se posent et la plupart auront leurs réponses à travers les cassettes qui remplacent intelligemment le Codec. Même si certains regretteront peut-être les discussions au Codec, la possibilité d’écouter son walkman librement est au final en parfait adéquation avec ce que propose le nouveau gameplay de la saga. Pratique lorsqu’on veut s’occuper tranquillement de la gestion de sa Mother Base tout en laissant s’enrichir le background scénaristique à l’écoute d’une cassette.
Quand le renard se mord la queue
Mais le coté open world de The Phantom Pain offre finalement une narration complètement déstructurée où certaines cinématiques plus ou moins importantes à bord de la Mother Base se débloqueront après avoir rempli certaines conditions, et pendant le dernier chapitre, cela en devient totalement pénible, au point de devoir refaire des missions principales dans un niveau de difficulté supérieur.
Cela est d’autant plus consternant que l’on vous fait revivre des moments de scénario jugés important dans le seul et unique but de débloquer la suite chronologique de l’histoire, paradoxe spatio-temporel quand tu nous tiens…
Pourquoi ne pas avoir mis toute ces missions dans les annexes afin de pouvoir profiter de l’histoire sans temps mort ?
Ne comptez donc pas sur un rythme de narration effréné comme nous l’avait habitué la saga, d’ailleurs si le jeu avait été plus court, le twist final aurait eu, à mon sens, bien plus d’impact.
Comme je le précisais le terrain de jeu est pour la première fois en monde ouvert, sauf durant les missions principales où celui-ci se restreint à une zone en particulier, si vous sortez des limites de cette zone, vous écoperez d’un jolie « échec de la mission ». Mais malgré cette limitation, les possibilités d’infiltration se révèlent extrêmement riches, et plus encore si vous avez développé l’équipement adéquat.
Il est pourtant paradoxale de constater que les missions les plus intéressantes sont celles qui vous imposent des limites liées à la topographie de l’environnement, et ce sera souvent durant ces missions là que l’on se questionnera sur l’intérêt d’un jeu « open world ». D’autant plus que les allers-retours jusqu’à la Mother Base en hélicoptère sont nombreux et qu’il vous sera impossible de faire appel à lui pour parcourir la carte d’un endroit à l’autre.
Difficile de savoir si cette orientation répond à la volonté de Konami de faire un jeu qui touche un maximum de public en réduisant la narration, ou si il s’agissait dés le départ d’une volonté de Kojima, qui avait déjà été fortement critiqué sur la longueur des cinématiques du 4 éme opus. Pourtant les faits sont là, et à choisir, j’aurais préféré encore des cinématiques plus présentes car le jeu dispose d’un tel contenu qu’on se sent parfois noyé dans une multitude de missions dont 80% d’entre-elles se résument à « extraire une cible ». Il est d’autant plus regrettable que la mise en scène façon camera à l’épaule des cinématiques est juste à couper le souffle.
Conclusion
Kojima nous livre bel et bien son chant du cygne pour Metal Gear Solid V, et il ne fait aucun doute qu’aux yeux de nombreux joueurs, qu’ils soient attachés ou pas à la saga, The Phamtom Pain restera un très bon jeu, que ça soit pour sa richesse, sa jouabilité repensée ou tout simplement pour l’excellence de son gameplay. Mais pour une poignée de fans, cet épisode se révélera également bien moins percutant que la plupart de ses prédécesseurs. A trop vouloir singer la concurrence et entrer dans le moule aseptisé de l’open world, The Phamtom Pain en oublie finalement ses racines, celle qui font qu’on aime tant MGS. Où sont passé les boss si charismatiques, le scénario au rythme haletant, les moments de gameplay innovants ?
L’effervescence liée à la sortie événementielle de Metal Gear Solid V : The Phantom Pain étant maintenant considérablement redescendue, on remarque que malgré toutes ses qualités, pour les fans attachés à l’ADN de la série et surtout pour Kojima, The Phamtom Pain se révèle être le chant d’un cygne qui aurait choppé une belle bronchite, ainsi qu’une « douleur fantôme » dans l’histoire du jeu vidéo, la douleur de ne pas avoir eu le Metal Gear Solid V que les fans étaient en droit d’espérer. Celui qui, à l’instar d’un Metal Gear Solid premier du nom ou d’un Snake Eater, aurait laissé dans nos souvenirs une marque indélébile, avant que les futurs pachinko sous le signe des Diamond Dogs inondent les salles de jeux japonaises…
Ne boudez pourtant pas votre plaisir, car si vous faites partie des joueurs préférant les titres qui mettent l’accent sur le gameplay, ainsi que le contenu avoisinant quasiment les 200h, alors ajoutez un point à la note définitive et sachez que Big Boss wants YOU!
Les plus :
- Jouabilité parfaitement repensée
- Richesse de gameplay et possibilités d’infiltration
- Durée de vie dantesque
Les moins :
- Rythme scénaristique raté
- Aucun Boss mémorable
- Missions extrêmement répétitives
- Un Snake qui s’exprime trop rarement
Note : 3,5/5