Critique du roman New York 2140

Je veux en faire partie, New York, New York 2140… Pas sûr que cette chanson devienne un succès quand on voit l’état de Big Apple, dans le récit de Kim Stanley Robinson, traduit par Sylvie Denis, toutefois arrivé à bon port chez Bragelonne.

New York 2140

Bien que l’action se déroule dans le futur, force est de constater que 2140 c’est demain ! Et si l’auteur nous emporte, tels les flots embarquant les bateaux taxis maritimes de son livre, en cette année-là où le monde a déjà diamétralement changé, il n’en reste pas moins proche de l’actuel. Même si depuis quelques mois, tous les romans d’anticipation se voient à nouveau ensevelis par la triste réalité. D’autant plus un comme celui-ci, ne se basant pas sur virus fléau ou encore un univers post-apocalyptique cyberpunk, à la violence encore plus exacerbée qu’aujourd’hui.

Ici, ce sont davantage l’aspect écologique, auquel la large majorité a continué à ne pas s’intéresser durant deux autres décennies, ainsi que la bulle spéculative, qui ont tout fait craquer pour de bon. Le niveau des Mers et autres Océans n’a eu de cesse de monter à cause de la fonte des glaces. Alors qu’en contrepartie vous avez pu remarquer qu’il ne pleut plus souvent des cordes.

La Grosse Pomme est bien sûr touchée et c’est au travers de la ville qui ne dort jamais, qu’on naviguera. Au propre, comme au figuré. D’ailleurs, nous faire parcourir les lieux, nous les comparer par rapport à comment ils se trouvaient avant… Fait pleinement partie de l’expérience. Une facette d’autant plus intéressante, si on ne connaît pas New York, soit le cas de la majorité des lectrices/eurs. On imagine que les autres y ressentiront à la place, un sentiment de bouleversement nostalgique et de tristesse.

Mais au sein de ces endroits, il y a des personnes. On suivra ainsi leurs péripéties, tout au long des plus de 650 pages. Une durée permettant d’établir chacun dans sa partie du bouquin. Une narration conçue pour vraiment s’imprégner de chaque. Alors que le narrateur The Citizen, possèdera lui des passages taillés pour nous marquer les différences, entre notre réalité et ce qu’on lit, en s’adressant directement à nous.

Alors qu’au fil du roman, on découvrira une galerie de protagonistes, à la grande variété. Des new-yorkais(e)s aux activités très différentes (policière, trader, idole du Net…), démontrant que le monde n’a pas tellement changé. Sans omettre le charismatique concierge, Vlade.
En revanche, celles et ceux-ci pourront et feront en sorte de changer leur vie. Voire au-delà. L’univers pouvant vite basculer, pour un tant soit peu que l’on décide de se bouger. Et New York 2140 n’hésite pas à appuyer sur ce point.

Se mêlent alors plusieurs genres littéraires et sensations. Entre le pamphlet éco-logique/nomique. N’hésitant pas à puiser dans cette identité de monnaie finalement non palpable, rendant folle la société. Et l’impact environnemental, sans hésiter à confier des solutions, en espérant que les citoyen(ne)s actuel(le)s non concerné(e)s jusqu’ici, se remuent enfin. Mais en tant que fiction, on nous fait tout autant vivre un périple au contenu épique. Souvent ponctué de dialogues ciselés pour insuffler un certain humour. Contrastant avec le côté plus dramatique de la situation climatique, humaine, financière, mais aussi de la facette thriller qui s’en dégage d’emblée, par la disparition des 2 codeurs vivant sur le toit de l’immeuble. Et justement à ce sujet, l’entrée en matière se teinte d’une drôlerie accrocheuse, avec une pointe de cynisme, collant tout à fait à l’atmosphère. Et sans laquelle la vie n’aurait certainement plus de sens, à la vue du désastre ambiant.

Conclusion

Évidemment intéressant par son propos écologique, même si de notre côté nous n’avons point besoin d’un livre pour nous faire bouger, New York 2140 s’avère tout autant un roman aux mécaniques et styles s’alliant de manières originales. Soit un combo réussit, entre vision concernée par notre monde et performance littéraire.