Après avoir édité Demon’s Souls en Europe, Bandai Namco ne pensait certainement pas avoir mis la main sur la poule aux œufs d’or. Mais 2 épisodes de Dark Souls et un Bloodborne plus tard, les faits sont là : From Software mené par le sadique Hidetaka Miyazaki nous ont tués à plusieurs reprises. Cherchant à nous pousser des centaines de fois hors de notre zone de confort, celle dans laquelle le joueur agréablement installé dans son canapé, pouvait recommencer au checkpoint 5 secondes après avoir trépassé, ne cherchant pas à mieux jouer, simplement refaire la même chose une ou deux fois jusqu’à progresser par un heureux hasard. Ça c’est ce qu’il se serait passé dans un jeu lambda, mais tout comme ses aînés, Dark Souls 3 n’est PAS un jeu lambda. Vous allez mourir oui, des centaines de fois certainement, mais le pire dans tout ça c’est que vous allez y prendre goût.
Vous pourriez très bien répondre à cela que mourir sans cesse dans un jeu n’est pas votre truc, que vous préférez être guidé, tenu par la main, avec plein de gros points rouges apparaissant sur votre écran pour vous indiquer vos objectifs. Ou encore que vous souhaitez que les objets soit en surbrillance pour savoir où interagir, sans oublier des cinématiques toute les heures pour faire avancer le scénario.
Observer, mourir (x10), observer, vaincre.
Je vous répondrais légitimement que c’est dans votre droit, et donc que Dark Souls 3 n’est peut-être pas fait pour vous. Mais essayez juste, deux ou trois heures, afin de ressentir cette réminiscence que j’ai traversée pour n’importe quel épisode des Souls. Celle-là même issue d’un lointain passé, où les jeux vous questionnaient encore, vous disant : « Tu veux voir la fin ? Alors tente ta chance gamin ».
Jouez à Dark Souls 3 et vous verrez ce sentiment (re)naitre en vous, ce sentiment que l’on vous met à l’épreuve, que l’on vous teste, car au final, votre seul et unique ennemi, c’est vous-même. Vous, qui êtes en train de dompter le jeu. Ce sera difficile, mais pas insurmontable pour autant. Car tout est calibré avec une telle précision que le jeu sera rarement mis en défaut. Sachez d’ailleurs que cet épisode est parfait pour les néophytes car il s’agit du plus facile de la série (Bloodborne et Demon’s Souls y compris). Seul votre sens de l’observation, vos réflexes et votre façon d’appréhender un environnement pour l’utiliser à votre avantage seront les clés de la victoire.
Cette volonté, cette ténacité que vous aller vous découvrir pour avancer ne se fait pas seulement grâce à l’apprentissage par l’échec, mais également par l’envie de découverte. En partie grâce à une direction artistique qui baigne dans le meilleur de la Dark Fantasy (Merci Berserk), avec des décors mélancoliques et horrifiques, mais toujours sublimes. Même si l’impression de déjà vu est souvent présente, ces derniers donnent envie de progresser et d’en voir encore plus. On regrettera un framerate pas toujours très stable et des textures qui apparaissent parfois de façon grossière.
Quant au level Design, celui-ci est une fois de plus au niveau de ce qui se fait de mieux, mettant parfois à l’amende les donjons des meilleurs Zelda. Pour ma part celui-ci est le meilleur argument de Dark Souls 3, l’exploration n’aura jamais été aussi passionnante. D’ailleurs, contrairement à l’exceptionnel Bloodborne, fouiller une zone minutieusement et s’aventurer dans les pires recoins en vaut cette fois largement la chandelle. Car vous trouverez de nombreux artefacts et équipements des plus utiles. C’est souvent après un combat bien balèze dans une zone particulièrement bien cachée que vous sentirez avoir mérité votre bouclier du dragon ou votre épée de glace.
Autre amélioration dans le level design, la distance que l’on doit parcourir du dernier feu jusqu’au boss s’est vue largement raccourcie, vous ne devrez donc pas vous retaper un rush d’esquive d’ennemis au risque de perdre une partie de votre barre de vie avant d’arriver face au seigneur de la zone. Par conséquent, les boss bien que difficiles m’ont semblé moins frustrants.
Timing is everything …
La frustration tiens, parlons-en. Dire que Dark Souls 3 est frustrant est à mon sens erroné dans la mesure ou chaque mort est loin d’être inutile. Cette frustration naît la plupart du temps des morts à répétition et intervient régulièrement face aux boss. Pourtant quoique vous en pensiez et sans parfois même le remarquer, votre œil le comprend lui, petit a petit, chaque mort n’est pas vaine, même le pire des idiots (et je sais de quoi je parle) finira par comprendre les patterns de chaque ennemi qui vous a vaincu plus d’une fois.
Vous trouverez finalement le bon timing pour rouler sous la masse de 30 kg d’un ennemi et contre-attaquer en lui montrant comment on digère l’acier proprement. Dans le même ordre d’idées vous grappillerez progressivement du terrain pour finalement libérer de nouveaux checkpoint en ravivant des feux, toujours motivé par l’envie d’en découvrir encore plus. Bien sur, ce qui m’a fallu 70h pour être bouclé, 45 suffiront aux meilleurs d’entre vous.
Les combats contre les nombreux boss qui parsèment le jeu méritent à eux seul un paragraphe. Avec toute l’expérience acquise dans les anciens épisodes, ces derniers ont désormais atteint leur point culminant, ce sont des joutes splendides, artistiques, brutales. Un maelström de violence ou après des dizaines de fois à mourir, vous allez finir par comprendre et élever votre jeu à un rang que vous n’auriez jamais imaginé, afin de sublimer ces duels pour les transformer en des moments purement épiques, où l’angoisse de mourir une nouvelle fois a disparue, où seule réside en vous une concentration infaillible, à un tel point que les mouvements de vos ennemis vous paraîtront beaucoup plus lent et lisible.
Se dessinera alors un morceau de bravoure dont vous serez l’unique compositeur, un concert de violence dont vous serez l’unique chef d’orchestre, et un combat dont vous serez en définitif le seul maître. De l’art, tout simplement. Et c’est uniquement pour ce genre de moment, que j’encouragerai quiconque de jouer à Dark Souls 3.
Dark Souls (3), le jeu qui vous rend meilleur
A l’époque ou je traînais difficilement ma bosse sur Demon’s Souls, je me souviens d’une connaissance qui me disait : « Dark Souls me rend meilleur ». J’avais des difficultés à comprendre le sens de ses propos. Je lui répondis d’un ton amusé et moqueur : « Tu veux dire sur le plan humain ? », « Ah Puta*n ! Joue à Dark Souls mec ! Tu comprendras ! », me dit-il en disparaissant dans un nuage de fumé (Si si !!)
Peu après mon premier rush sur Dark Souls, je compris enfin le sens de ces mots, oui Dark Souls rend meilleur, et Dark Souls 3 véhicule tout ce qu’il y a de mieux en terme de sensation de jeu, par adéquation toute ces sensations se transposent sur le joueur, qui tombe encore et encore pour mieux se relever et constater qu’il ne s’était probablement jamais battu avec autant d’acharnement pour quelque chose. progressivement, l’on devient plus tenace, plus curieux, mais surtout on prend du plaisir à ne plus savoir qu’en faire.
Si Dark Souls 3 est votre premier épisode, ne venez surtout pas croire que ces sensations ne seront ressenties que par les bons joueurs, car à titre personnel, je n’en fais pas partie. Dark Souls 3 est un jeu difficile pour des tonnes de raisons, mais il est vraisemblablement une expérience vidéoludique qu’il faut au moins connaître une fois dans sa vie de joueur. De plus, il ne faut pas oublier que ce troisième opus reste un A-RPG, par conséquent si vous bloquez, si les ennemis de la zone vous semble trop ardues, ou si vous tombez sur un boss retors, n’hésitez pas à faire du level up, en vous concentrant si possible sur l’endurance, cela vous aidera certainement.
Pour les habitués de la série, mettons les choses au clair avec un bon gros « Backstab ». Dark Souls 3 n’offre rien de nouveau par rapport à ses aînés, tout juste un bouton pour utiliser la deuxième commande d’une arme ou d’un bouclier. Le gameplay reste le même en y ajoutant l’expérience acquise sur Bloodborne afin d’être encore peaufiné, la jouabilité approche encore plus prêt des limites de la perfection, le level design est du même acabit que Dark Souls premier du nom. Pour faire court et mauvaise langue (foutu puriste), Dark Souls 3 est un peu le Menu Maxi Best Of de la saga avec supplément salade, tomates, oignons, car Il reprend et sublime probablement les meilleures idées de la série, Bloodborne et Demon’s Souls compris.
Forcément, le temps que l’effervescence redescende un peu et la plupart des hipsters s’écriront sans doute que Dark Souls 3 est un étron à coté du premier épisode ou même de Demon’s Souls car celui-ci a cédé aux sirènes du grand public. Ce troisième opus de Dark Souls a la particularité d’être le plus accessible en terme de difficulté mais aussi en terme de narration (toujours indirecte) qui semble cette fois moins diluée, avec plus de dialogue. Ce qui ne veut pas dire non plus que l’histoire est facilement compréhensible mais en tout cas, elle l’est plus que dans les autres épisodes.
Ce sera à vous de recoller les morceaux en explorant les magnifiques environnements et en comprenant leurs histoires. Ainsi, tout comme pour les combats tout sera basé sur votre sens aiguë de l’observation. Traversez le jeu en courant et non seulement vous trépasserez (très) souvent mais en plus, raterez 70% de l’histoire. Alors ne doutez pas que Dark Souls 3 soit un grand jeu, surtout s’il s’agit de votre premier Souls.
Conclusion :
Il suffit que quiconque finisse Dark Souls 3 pour douter fortement que Bandai Namco décide de lâcher sa poule aux œufs d’or aussi facilement. Mais pour Miyazaki, cela semble être définitif, il met ainsi un point final à ce qui constitue probablement la plus puissante saga de ces 2 dernières générations de consoles. Dark Souls 3 paraîtra donc pour certains une redite des épisodes précédent, ce qui n’est pas faux, mais il cristallise pourtant tout ce qu’il y a de meilleurs dans la saga (Bloodborne et Demon Souls compris). Mieux encore, Dark Souls 3 est la preuve même qu’un auteur qui est arrivé au bout d’un concept, et d’un gameplay qui n’a désormais plus rien à raconter, peut toujours faire quelque chose d’exceptionnel. Miyazaki-san, merci.
Les plus :
- Les boss épiques
- Direction artistique au top
- Ambiance de dingue
- Difficulté dosée à la perfection
- Bestiaire toujours aussi riche
- Les musiques avec un Motoi Sakuraba en forme
Les moins :
- La recette n’a pas évoluée
- Framerate instable
Note : 4.5/5