Chronique roman Le Château Solitaire dans le Miroir

La déscolarisation de masse, pour ne trouver aucune voie annexe par des jeunes désocialisé.e.s, s’avère un énorme problème depuis nombre d’années au Japon. Un sujet que Mizuki Tsujimura évoquera durant Le château solitaire dans le miroir (Éditions Milan), traduit par Jean De la Couronne et à la couverture illustrée par Zennosuke, entre dure réalité et monde de fantasy.

Le château solitaire dans le miroir

Déscolarisée peu après son entrée au collège, Kokoro se sent mal. Honteuse de rester chez elle, alors que les autres vivent leur train-train quotidien. Enfants évidemment, mais également leurs parents. Dont sa mère et son père. La première, gentille, (trop ?) prévenante, essayant de soutenir sa fille sans ne savoir comment faire… Tandis que le second est plutôt absent par son travail. Et s’il n’est virulent, il reste moins éponge que sa femme. Ayant même retiré la console, afin d’éviter que l’adolescente ne passe ses journées à jouer.

Des journées monotones, voire mornes, connaissant l’enchaînement des programmes télévisés et celui basique des gens allant et venant dans la vie se déroulant à l’extérieur. Elle qui n’y va plus ou presque, par crainte de croiser qui que ce soit. Refusant également au dernier moment de rejoindre l’institut qu’elle a pu visiter avec sa maman. Les relations avec autrui sont compliquées pour elle. Sa boule au ventre grossit quand une personne en rapport avec l’école vient à la maison. Comme une ex-camarade transmettant les devoirs.

Camarade mais surtout pas ou plus amie a priori. Si on ne nous dévoile tout d’emblée sur les raisons et relations, on nous fait part dès les débuts de son mal-être avec les autres. Ou  tout du moins une partie. Elle souhaiterait avoir des ami.e.s, mais peut-être trop réservée. N’osant se soulever face à la bande de pestes et surtout leur cheffe Sanada, elle s’en trouve leur souffre-douleur. Progressivement, on en apprendra davantage sur des évènements scolaires passés, poussant à cette incapacité de retourner en classe.

Une rude réalité, complètement bouleversée le jour où elle traverse le miroir de sa chambre. Si l’invraisemblable château dans lequel elle se retrouve, en compagnie de 6 autres collégien.ne.s ne se connaissant pour l’instant entre elles et eux, pourrait sembler un vrai refuge, un drôle d’accueil est réservé. Une jeune fille affublée d’un masque de loup et non juste d’un loup, leur explique qu’elles et ils jusqu’à la fin de l’année scolaire au Japon, pour dénicher la clé ouvrant la Chambre des souhaits. Cette dernière offrira à sa ou son gagnant.e un vœu, aussi incroyable soit-il. Véridique, piège, réalité, rêve… ? Comment le savoir ? Quoi qu’il en soit, la bande évoluera différemment au fil des jours. Entre venues régulières ou sporadiques, faites de fouilles, d’approfondissement des relations, de distractions jusqu’à 17 heures maximum…

Oui pas plus tard, car sinon le loup y sera et les mangera ! Néanmoins, cette course ne semble tant les préoccuper. En tout cas en apparence. Car derrière, on se doute que chaque effectue ses recherches. Mais en évitant soigneusement d’en parler. Finalement, le but est-il l’important ou s’agit-il plutôt du voyage ? Car au fil des mois, la bande noue des liens. Avec des hauts, des bas, de la rigolade, des disputes… Et les délicats sujets touchant apparemment ses membres. Particulièrement celui de leur déscolarisation. Plus les langues se délient, plus les ados se découvriront des points communs renforçant leur curiosité et à la fois l’étrange dimension de cet univers au-delà du miroir.

L’objectif clé n’est pour autant omis et cette quête se poursuivra également, avec peut-être une alliance entre celles et ceux découvrant la fameuse force de l’amitié. Une force pouvant aider notre héroïne dans sa vie « IRL » ? Car cette ignoble situation ne peut à la fois perdurer, Kororo jonglant évidemment entre ces deux facettes avec souffrance.

Conclusion

Abordant avec sensibilité et une teinte fantastique cette thématique dont on ne devrait avoir peur de parler, afin de libérer la parole et agir comme il se doit, Le château solitaire dans le miroir est typiquement un roman que toutes les générations devraient lire. Pouvant y puiser une force pour oser signaler un harcèlement, en établissement scolaire ou non. Mais aussi en repérer et franchir le cap de la peur de le demander aux victimes.