Quand l’univers d’une bande-dessinée mêlant Hollywood, grosses crapules et petites frappes est si fort qu’il est repris pour un jeu vidéo tout aussi irrévérencieux, cela donne envie de se pencher sur le livre lorsque, comme moi, on a connu le soft Blue Estate sur PS4 et Xbox One auparavant.
Le démarrage de Blue Estate plaira d’ailleurs fortement à ceux y attendant une affiliation au monde du jeu vidéo, dans le cas où ils auraient eux aussi découvert la version vidéo-ludique dans un premier temps. On peut y voir le détective privé Roy Devine Jr jouant à la Wii, tout en regardant une fameuse série policière dont le speech (à retrouver dans le texte) avant chaque épisode est plutôt connu… New-York Unité Spéciale vous l’aurez devinée, le tout dans une atmosphère assez cradingue. On y ressent ce cliché volontaire renvoyant à l’adolescent dit geek, mais en réalité tout bonnement adolescent.
Le style de l’auteur permet de bien accentuer ce côté sale, grâce à un trait sachant être percutant, identifiant la personnalité (ou du moins celle que l’on désire nous faire croire) d’un protagoniste au premier coup d’œil et des couleurs sombres rendant les séquences plus intenses. Des tons propres à ce livre viennent d’ailleurs régulièrement nous plonger dans leur ambiance parfois glauque. On relèvera en particulier les teintes vertes très présentes. Tandis que le travail sur les lumières est lui aussi grandiose, notamment lors de scènes en club de nuit, où les spots illuminent la strip-teaseuse d’un jaune puissant, carrément décalé par rapport à l’ensemble des cases. Pas de vifs coloris au sein de celles-ci, qui pourraient nous éloigner de l’atmosphère noire mais à la fois haute en couleurs de la BD.
Haute en couleurs car cette dernière dépeint des situations et des personnages tous plus tordus les uns que les autres, se croisant et se décroisant, confrontant leurs caractères et leurs avis à propos de la situation de l’un ou de l’autre. Quand la plupart des œuvres restent très manichéennes, Blue Estate met un coup de pied dans le tas, puis saute dessus, avant de lui uriner en pleine face. En somme, elle mixe surprises, relations humaines sulfureuses, action et surtout est blindée d’humour.
Sur ce point, les références vont d’ailleurs bon train et l’on relèvera à ce propos des points marquants ne faisant même pas partie de l’histoire, mais s’avérant tout simplement être les passages vers un nouveau chapitre. Ceux-ci étant illustrés par une page pleine de détails, généralement drôles et renvoyant à un maximum de références néanmoins justifiées. La plupart devant être aisément perceptibles par le public s’étant plus que volontairement jeté sur ce bouquin. Celles-ci naviguant particulièrement vers le cinéma ou encore les journaux à sensations. Concernant cette dernière catégorie, elle permettra même de voir le nom d’un immensément réputé sauveteur en short rouge, tout d’abord pilote d’une voiture discutant avec lui. On retrouvé d’ailleurs son nom à nouveau cité, mais cette fois-ci directement dans les dialogues. L’auteur aurait-il une passion pour lui ? A bien y réfléchir, nous sommes tous férus de celui qui a pu reconduire Patrick et Bob vers l’Océan.
Sujet important pour beaucoup de lectrices/eurs, parlons de l’objet en lui-même. Blue Estate est un très bel ouvrage de 80 pages, avec un papier de qualité permettant de rendre honneur aux multiples jeux de couleurs essentiels à ce bouquin, en plus d’une belle couverture rendant le livre agréable et facile à disposer dans sa collection, surtout pour celles et ceux adorant la mettre en avant.
La fin de ce premier tome de Blue Estate nous tient véritablement en haleine, tant les moult évènements rencontrés ont tendance à nous la faire perdre. On ne peut donc qu’avoir hâte de découvrir la suite.
Histoire originale : Viktor Kalvachev et Kosta Yanev
Scénario : Andrew Osborne
Dessin : Viktor Kalvachev, Toby Cypress, Nathan Fox et Robert Valley
Direction artistique : Viktor Kalvachev
Editeur : Ankama Éditions (boutique en ligne)
Collection : Hostile Holster